Poursuite envers la GRC: Enquêtes équitables ou impartiales ?

Dans la plupart des pays de l’Ouest, la police détient une certaine discrétion concernant la violence. Malgré certaines balises encadrant cette pratique, jusqu’où les policiers peuvent-ils utiliser cette violence? Que veut dire utiliser la force nécessaire? Comment font-ils pour juger ce qui est nécessaire de ce qu’il ne l’est pas? Leur mission, l’application de la loi ainsi que le maintien de l’ordre, réfère à des situations parfois ambiguës où les décisions doivent se prendre rapidement et où la discrétion des policiers est mise en jeu. De ce fait, il n’est pas rare que nous entendions parler de certains incidents, impliquant des policiers, qui sont survenus suite à une intervention policière qui a mal tournée.

Le 11 février 2012, près de Fort McMurray, en Alberta, les policiers de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) sont à la poursuite d’un adolescent de 16 ans qui circule dans une voiture volée de marque Toyota Corolla. Après avoir été encerclé par trois automobiles de patrouille, le jeune homme a tenté de fuir la police. À ce moment, deux des agents présents décident de faire feu en direction du jeune homme. Blessé par une des balles, il s’immobilise et se fait sortir en dehors du véhicule par ces deux agents, ce qui aggrave sa blessure. Ceux-ci, fiers de leur coup se félicitent et se tapent dans la main en s’adressant à l’adolescent en lui mentionnant qu’il avait eu ce qu’il méritait, selon l’article de Radio-Canada.

Suite a cette intervention, le jeune homme a été transporté à l’hôpital où l’on a constaté que la balle l’avait atteint à la moelle épinière et ceci a fait en sorte de le rendre paraplégique. Fâché de la situation, il décide de poursuivre la Gendarmerie Royale du Canada pour 10.5 millions de dollars. Cette poursuite vise plus de 9 agents de la GRC, le procureur général du Canada ainsi que le commissaire de la GRC.

Suite à cet incident, ainsi que d’autres bavures policières reliées à la violence comme l’article «Avec ou sans arme» de ce blogue nous raconte, il est important de considérer les procédures d’enquête suite à ce type de situation.

Lors des incidents impliquant des policiers, une procédure est mise en œuvre afin de faire la lumière sur ce qui est arrivé concrètement. En Alberta, ils ont fondé l’Alberta Serious Incident Response Team (ASIRT) en 2008. On a formé ce comité puisque les policiers trouvaient qu’il était difficile de garder la confidentialité lors de ces enquêtes concernant des policiers et, de ce fait, il n’était pas simple de rassurer le public sur l’impartialité de celles-ci. En effet, le public a une perception de la police bien différente de celles de policiers, eux-mêmes. Le public, la plupart du temps influencé par les médias, a des attentes démesurées du rôle de la police. La peur du crime les amène à attitrer une tolérance zéro au niveau de la criminalité, on s’attend donc à ce que les policiers nous protègent des criminels, qui sont en fait d’autres citoyens.

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L’ASIRT est composé de 14 membres, dont un directeur civil qui est un procureur de la couronne, des policiers en service ou retraités qui servent de chefs d’équipe et d’enquêteurs ainsi que plusieurs analystes criminels. Le contrat de chacun des membres, qui ne travaille pas pour le même service de police que le policier concerné dans la cause, est d’une durée de 2 ans. Lors de ces enquêtes, on préconise les méthodes d’enquête des crimes majeurs, on produit ensuite un rapport qui est envoyé au procureur de la couronne. Celui-ci donne son avis sur la situation et il indique si selon lui, il y aurait lieu de porter des accusations. Dans le cas présent, le procureur affirmait que les gestes des deux agents étaient justifiés et tout à fait légaux. Pour sa part, il n’aurait pas porté d’accusations au criminel pour cet incident. Cependant, la décision finale revient au directeur de l’ASIRT.

Au Québec, un Rapport spécial du protecteur du citoyen amène des recommandations afin de contrer le manque de confiance du public envers les enquêtes ainsi qu’à apporter de la crédibilité à celles-ci. Ayant, de près, les mêmes procédures que la province de l’Alberta lors de situations semblables, ce rapport affirme qu’il doit y avoir des balises qui encadrent et qui rendent l’enquête plus formelle. Les méthodes d’enquête devraient être les mêmes pour chaque enquête, et ce, à travers le pays. Pour le public, être en mesure de comprendre le processus de celles-ci et amener l’uniformisation de ces procédures amène à accorder leur confiance et ainsi s’assurer d’une décision équitable. Contrairement aux autres provinces, l’Ontario a établi un cadre strict contenant des réglementations ainsi que des obligations lors de pareilles enquêtes. Les procédures deviennent légales et ainsi chaque dérogation du cadre devient une infraction.

Les mesures de l’Ontario seraient-elles des solutions pour les autres provinces? Effectivement, il serait important d’encadrer les procédures d’enquête afin d’assurer l’impartialité et ainsi arriver à un verdict juste de la situation. Concernant le pouvoir discrétionnaire des policiers au niveau de la violence utilisée, il est évident qu’ils doivent le conserver. Ils ont été formés à ces fins et parfois la rapidité de l’action nous amène à faire des erreurs. Est-ce qu’il y a réellement une solution afin de diminuer ce type de situation?