Défaite des États-Unis dans la guerre contre la drogue
Le contexte qui a mené à la guerre contre le narcotrafic

Il y a environ 45 ans, les cartels colombiens gagnaient en puissance de manière effrénée. Ils prenaient férocement possession de la Colombie, et visaient ensuite le marché de la drogue des États-Unis. Le narcotrafic étant illégal en soit, il est souvent accompagné de beaucoup de violence, ce qui justifiait une intervention rapide de l’État. En 1971, Nixon déclarait la guerre à la drogue et, deux ans plus tard, créait la Drug Enforcement Administration (DEA), qui avait pour mandat de contrôler le marché illicite de la drogue.
Ce qu’il en est aujourd’hui
Plus de 1000 milliards de dollars plus tard, nous voilà contraints de regarder la vérité en face : la guerre déclarée par Nixon est perdue. Malgré les efforts déployés par DEA, qui s’autorise des raids chez les citoyens (intervention tôt le matin ou tard le soir dans le but de surprendre la personne visée), qui renforce les stéréotypes raciaux en visant particulièrement les minorités ethniques et qui fait incarcérer un nombre vertigineux de présumés contrevenants chaque année, ce n’est qu’un pourcent de la drogue qui réussit à être saisie sur les territoires américains. Autant dire que l’investissement est vain.
La faute à qui?
Évidemment, pointer du doigt la DEA serait une grave erreur : cette agence fédérale n’a (grossièrement) pour but que d’appliquer la loi. C’est, en effet, la prohibition de toutes les drogues qui crée autant d’émois : tant que ce marché lucratif restera illégal, il restera toujours des gens prêts à prendre le risque de faire de la prison pour profiter de cette mine d’or. Plus on fait d’arrestations, plus on laisse de place à de nouveaux vendeurs pour prendre le relais. Naturellement, la DEA ne fait pas la loi: elle lutte tant bien que mal pour l’appliquer. Il y a tout de même matière à avoir de sérieux doutes quant à l’opinion de la DEA en ce qui a trait à la légalisation ou non de toutes les/certaines drogues. En effet, elle perdrait sa raison même d’exister : sans marché de la drogue illicite, la DEA n’aurait d’autre choix que de disparaître à son tour.
Mettre un terme à la guerre contre la drogue, c’est pour quand?

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : on investit annuellement 51 milliards dans la guerre contre la drogue, et on saisit pour l’équivalent de 477 millions de dollars en drogues illégales. Lorsque l’on regarde l’impact réel de la dépense, il y a de quoi être assommé : 1,55 millions de personnes d’incarcérées pour possession simple par année et un marché de la drogue plus florissant que jamais. Ces incarcérations représentent le gros de la dépense en ce qui a trait à la guerre contre la drogue. Il y a donc matière à se questionner : y a-t-il un réel intérêt à embourber le système carcéral de personnes portant une quantité minime de drogues sur eux? Représentent-ils réellement des dangers pour la société? À noter que l’intention premières des établissements correctionnels est de réinsérer socialement les contrevenants qui leur sont confiés. Ont-ils donc un rôle utile à jouer dans la vie de ces gens?
La légalisation de toutes les drogues, donc?
Bien sûr, mettre un terme à la guerre contre la drogue n’est pas synonyme de mettre un terme à la prohibition : ceci constitue un tout autre débat. Toutefois, les sommes astronomiques injectées dans cette lutte inégale justifieraient le démembrement de la DEA. Il faut en venir à l’évidence : cette agence fédérale est désuète. Il n’est pas question ici d’adopter un autre angle que la répression, seulement, il n’est peut-être pas nécessaire d’avoir une agence entièrement consacrée à la pourchasse des trafiquants de drogues. Ce mandat pourrait être relayé à d’autres corps existant, tels que le Federal Bureau of Investigation (FBI) ou la police étatique (State Police).
L’opinion de la population
Évidemment, si les États-Unis venaient qu’à morceler la DEA ou à la fusionner à une autre agence, on ne peut que s’imaginer comment cela reçu dans la population. On peut prédire la catastrophe: si certains ne croiront pas que l’État encourage le commerce de la drogue, ils penseront certainement qu’ils sont laissés à eux-mêmes. Parce que dans les faits, c’est la raison même de créer un corps de police: répondre à un besoin criant en matière de sécurité et d’application de la loi. La DEA étant une agence vieille de plus de 45 ans, la population se sentira démunie en voyant le problème de la drogue perdurer, ne sachant pas que ce dernier reste entier avec ou sans agence pour tenter de le contrôler. Voilà peut-être une bonne raison de garder cette agence fédérale sur pieds: gagner la confiance de la population et, par le fait même, lui acheter la paix. Cher payé un peu, mais résultats garantis.