Réduction du nombre de caméras de surveillance à Montréal

Dans les dernières années, plusieurs agressions homophones se sont produites dans la ville de Montréal. Plus précisément, en 2014, une série d’agressions contre des homosexuels a été commise et le maire de Montréal, Denis Coderre, avait affirmé haut et fort que des mesures seraient mises en place afin d’enrayerRésultats de recherche d'images pour « surveillance par caméra SPVM » ce fléau. Monsieur le maire déclarait que le service de police de la ville de Montréal (SPVM) augmenterait ses effectifs concernant la vidéosurveillance où plusieurs caméras seraient positionnées à des endroits stratégiques, par exemple près de la station de métro Beaudry où plusieurs agressions homophobes ont été rapportées.

Cette stratégie vise une tolérance zéro vis-à-vis des incivilités et nécessite une intervention immédiate afin de maximiser son efficacité. Monsieur Louis-Alain Robitaille, porte-parole du Collectif Carré rose, ajoute que les individus seront plus enclins à dénoncer ces actes répréhensibles s’il y a des caméras de surveillance à l’appui, utilisables comme preuve ou comme simple renseignement.

Dès 2014 le maire avait questionné les citoyens par rapport à l’augmentation du nombre de caméras de surveillance du SPVM, afin de tâter l’opinion publique. Il avait annoncé la formation d’un comité afin de discuter de cette intervention. Cependant, selon Radio-Canada, les démarches du maire et du SPVM semblent floues et le public n’a pas été informé de la suite des évènements.

Deux ans plus tard, en 2016, une autre agression homophobe est commise dans les rues de Montréal et les citoyens se questionnent concernant le plan d’action du maire Coderre puisqu’il n’y a pas eu d’augmentation des systèmes de vidéosurveillance comme il l’avait annoncé précédemment. Selon Radio-Canada, seulement cinq caméras ont été achetées depuis 2014 et pas une seule n’a été installée.

C’est alors que le maire ainsi que le SPVM ont réorienté leur vision concernant les techniques de gestion et d’évaluation des risques d’agression en lien avec la vidéosurveillance. Ils miseront davantage sur une approche terrain plutôt que d’augmenter le nombre de caméras. Pourquoi ce changement de cap? Le commandant du poste de quartier 22, Simon Durocher mentionne que « le besoin ne s’en fait pas sentir, il n’y a pas un crime en particulier qui justifie l’installation d’une caméra ». Le SPVM a récolté des statistiques qui illustrent une baisse de la criminalité dans le quartier, et ce, sans vidéosurveillance. Un exemple qui prouve les dires de monsieur Durocher concernant la présence de caméras et le taux de criminalité est celui de la ville de Londres. Les citoyens londoniens se trouvent capturés dans leurs activités quotidiennes 300 fois par jour par au moins 30 systèmes vidéos différents. Le taux de criminalité de la ville est-il plus bas? Non.

Monsieur Durocher affirme que la présence de caméras de surveillance implique des limites importantes à considérer. Tout d’abord, il parle d’un « déplacement de la criminalité », soit en dehors du champ de vision des caméras, et cela devient un obstacle important à la lutte contre le trafic de drogues. Dans le même ordre d’idée, le professeur de l’école de criminologie de Montréal, Rémi Boivin, mentionne que « le SPVM est très cohérent avec la littérature scientifique » concernant l’usage de la vidéosurveillance et c’est pourquoi il a réorienté son intervention.

La littérature scientifique sur l’efficacité de la vidéosurveillance a beaucoup évolué. Par exemple, l’étude de Welsh et Farrington pour le Home Office 2002, 2009, déclare que l’efficacité des caméras de surveillance dépend de plusieurs facteurs soit, la facilité de prendre la fuite, l’éclairage et la visibilité générale (murs, clôtures, bosquets) ou la présence de personnel de sécurité pouvant répondre rapidement. Les auteurs ont découvert que ces trois éléments diminuent déjà la criminalité sans la présence de caméras de surveillance. Ces dernières sont donc non pertinentes pour viser une réduction de la criminalité. Il n’est donc pas souhaitable pour le SPVM et le maire de Montréal d’investir des milliers de dollars dans la surveillance par caméras alors que son efficacité « propre » n’est pas significativement représentative.

Bien que le SPVM démontre de la cohérence avec la science, d’autres services de police au Québec vantent les biens-faits des caméras au sein de leur ville. Le porte-parole du Service de Police de la ville de Sherbrooke, Martin Carrier, annonce que « les caméras ont permis 143 interventions pour l’été 2015 ainsi que 26 arrestations ou contraventions et actions de prévention, comme de calmer un attroupement. Elles sont très utiles ». Il n’y a pas si longtemps, le SPVM était du même avis que la ville de Sherbrooke. Grâce au projet Robot-Cam en 2005, il avait déclaré une diminution du trafic de drogue dans la ville de Montréal et confirmait qu’il avait entre les mains la meilleure façon de prévenir la criminalité.

Aujourd’hui, monsieur Durocher rassure la population en affirmant que des milliers de caméras sont déjà disponibles chez l’ensemble des citoyens « soit via les cellulaires ou les caméras de surveillances des commerces environnants et sans parler des caméras que possèdent la Société de Transport de Montréal ainsi que l’Office municipale d’habitation ». De plus, l’arrivée des nouvelles caméras corporelles du SPVM augmentera nécessairement le phénomène de vidéosurveillance dans les rues de Montréal. Bien que ce changement d’orientation soit appuyé scientifiquement, se pourrait-il que ce soit dû à une déresponsabilisation de l’État concernant le maintien de l’ordre? Est-ce que le SPVM se fie sur les citoyens et leurs propres technologies pour maintenir l’ordre? Est-ce simplement une question de coût? Reste à voir pour qui cela sera profitable…