Cas Daphnée Boudreault: La réponse policière en matière de violence conjugale est-elle suffisante ?

C’est ce qu’il faut se demander en regardant la situation de Daphnée Boudreault qui en à payer de sa vie. Malgré le fait qu’elle avait alerté les policiers un peu plus tôt avant le drame, ceux-ci n’ont pas pu éviter le pire. Suite à sa visite au poste de police, elle devait être escortée jusqu’à son domicile, ce qui n’est pas arrivé pour des raisons toujours inconnues. La jeune femme s’est présentée seule à son domicile et c’est à ce moment que Anthony Pratte l’a poignardé à mort. Seulement quelque temps après, la policière qui devait l’escorter est arrivée à son domicile et a constaté les faits. Bref, à première vue, il est difficile, dans cette situation, de juger si le travail de la police a été suffisant.

La problématique de violence conjugale est assez répandue. Au Canada, environ 4% de la population en couple subit ce type d’agression. Malgré la baisse significative des cas de violence conjugale, le nombre de plaintes faites à la police demeure relativement élevé. Parmi les cas dénoncés, il y a des situations de tous les niveaux et cela peut rendre difficile la détection d’un véritable danger imminent.  Parfois, sans séquelle apparente, les victimes ne sont pas toujours prises au sérieux. La violence conjugale peut se faire de diverses façons, autant psychologiques que physiques. Majoritairement démunies de toute estime d’elle-même, les victimes ont peur de dénoncer leur bourreau ce qui rend leur témoignage parfois faible en preuve. Souvent trop affectées psychologiquement, seulement entre 22% et 28% des victimes finissent par porter plainte. De plus, il ne faut surtout pas négliger les fausses accusations que certaines personnes peuvent faire. Tenant compte du manque de preuve et de l’importance de la problématique, les policiers doivent utiliser un protocole précis tout en faisant preuve de jugement vis-à-vis la situation. Il est donc possible qu’il se glisse certaines erreurs et, malheureusement, que certains cas passent sous les radars. Est-ce pour autant une erreur policière ?

Depuis quelque temps, la police dite ‘’chevalière’’ a laissé place à une police d’avantage communautaire. Ces policiers sont de plus en plus formés afin de répondre aux besoins de la société en matière de prévention. En effet, il va de soi que la communauté espère être protégée de ce type de crime répandu. Par contre, les mesures de prévention que les policiers possèdent pour agir dans de telles situations demeurent plutôt restreintes puisque cette violence est souvent privée et invisible de l’extérieur. Ils doivent gérer des situations qui sont à la fois difficiles tout en faisant preuve d’un bon jugement dans leurs actions.

Encadré par des lois et des protocoles, cela limite le risque d’erreur possible. Par contre, certaines exceptions peuvent venir s’y glisser. Les policiers n’ont pas une formation de thérapeute, de psychologue ou de travailleur social. C’est donc avec leur formation d’intervenant de première ligne qu’ils doivent aider les victimes et filtrer les appels à l’aide. Leur charge de travail impose qu’une décision rapide soit prise. La police ne peut pas offrir toutes les expertises, elle doit agir en partenariat avec plusieurs autres services afin de former un tout qui comble tous les besoins de la société. C’est pourquoi, évidemment que leur formation manque de contenu dans le domaine. Ils vont aider la victime à s’en sortir et à aller chercher de l’aide dans des services communautaires qui peuvent lui assurer un hébergement temporaire sécuritaire. Respectant chacun leur rôle prédéterminé, ils pourront répondre aux besoins de façon adéquate. D’ailleurs, les procédures judiciaires étant longues ou insuffisantes, les organisations communautaires peuvent venir en aide aux victimes durant ce temps.

L’attente du public envers la police dépasse largement les fonctions que celle-ci occupe et entraîne une énorme pression pour ces professionnels. Cette attente est amplifiée par la discorde entre les médias et la police. Dans le cas de la jeune femme de 18 ans, les médias, sans analyse profonde, ont instantanément remis en question le travail des policiers. Par le biais de témoignages des proches de la victime, les médias, font croire à la population qu’il y aurait véritablement une faute professionnelle dans cette situation. Pourtant, rationnellement, une mère qui perd son enfant dans de telles circonstances n’ira pas vendre les exploits de l’organisation policière. S’agit-il pour autant d’une faute professionnelle ou d’un manque de formation de leur part ? Les médias recevant leur bénéfice par le biais de cote d’écoute, vont rechercher tout ce qui est sensationnel. Par ailleurs, le témoignage de faux experts en est la preuve. Bien évidemment, la directrice de la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes s’y connaît dans l’aide à apporter aux femmes. Par contre, ces connaissances envers le rôle et les compétences policières ne sont probablement pas suffisantes afin de témoigner en tant qu’expert. Le problème avec ce témoignage est que la population ne verra pas sa fausse expertise et prendra tous ces arguments comme étant la vérité.

Il y a en effet une faille dans le système judiciaire afin de traiter en urgence les cas comme celui de Daphnée. Une formation davantage adéquate des policiers ou bien une présence de psychologue pourrait être nécessaire afin d’éviter que de telles situations ne se reproduisent trop souvent. Par contre, rejeter la faute uniquement sur les policiers est peut-être facile et évident à première vue, mais n’est pas toujours représentatif de la réalité. Bien sûr, il s’agit d’une situation qui aurait pu être évitée, mais la faille ne provient peut-être pas que du service de police. D’autres facteurs comme le manque d’expertise dans le domaine ou l’état psychologique de la victime parfois difficile à cerner, peuvent être des causes d’erreur d’évaluation.  Il faudra voir si le protocole est adéquat afin de bien répondre à l’urgence de la violence conjugale.