La Sûreté du Québec relève de leurs fonctions 2 policiers impliqués dans l’opération de secours. Une enquête interne est en cours
Le 14 et le 15 mars dernier, la plus importante tempête de l’hiver s’est abattue sur la province de Québec. C’est près de trois cents automobilistes qui sont restés pris au piège dans leur véhicule durant la nuit sur l’autoroute 13 Sud, reliant les autoroutes 20 et 40 dans l’ouest de Montréal, pendant plus d’une douzaine d’heures, enlisés dans de la neige qui ne cessait de s’accumuler sur la route. Il n’y a pas que des véhicules de citoyens qui se sont fait prendre par la tempête, mais aussi des autopatrouilles. C’est au moins trois véhicules de la Sûreté du Québec (SQ) qui ont aussi été coincés dans l’embouteillage. Cette tempête de neige a fait perdre la vie à sept personnes dans l’ensemble de la province dont deux hommes qui ont été retrouvés prisonnier de la neige sur la route à Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud dans Chaudière-Appalaches. D’autres incidents tragiques se sont produits sur l’autoroute 20, l’autoroute 55 et l’autoroute 10.

Photo: Patrick Sanfaçon Image:La Presse
Suite à ces tristes événements où la situation est considérée comme inacceptable par la police provinciale, celle-ci a reconnu jeudi avoir agi «trop tard» pour venir en aide aux automobilistes ensevelis dans la neige. Le directeur de la Sûreté du Québec, Martin Prud’homme, a commandé une enquête interne pour faire la lumière sur la chaîne de décisions. Le travail des patrouilleurs n’est pas à blâmer et n’est donc pas tenu en compte pour l’enquête interne. C’est plutôt le travail des dirigeants lors de l’opération qui est visé pour ne pas avoir mis en place plus rapidement un plan d’assistance et d’évacuation pour les automobilistes pris au piège dans leur voiture enlisée dans la neige. Le capitaine et porte parole de la Sûreté du Québec, Guy Lapointe, estime que la Société de transport de Montréal ou encore le Service de sécurité incendie de Montréal auraient dû être appelés plus vite en renfort compte tenu des conditions climatiques et routières difficiles. Ce qui a retardé le déploiement de l’opération d’évacuation est une question de prendre la bonne décision et non une question de savoir si les policiers ignoraient le fait que des gens étaient pris sur l’autoroute 13. Une enquête externe a également été mise en place par le gouvernement du premier ministre Philippe Couillard. Cette enquête sera présidée par Florent Gagné qui considère que ce qui s’est produit n’est pas normal.
Peu après le début de son enquête interne, la police provinciale a pris la décision, jeudi matin le 16 mars, de suspendre le policier responsable de la gestion de la tempête sur l’autoroute 13 dans la nuit de mardi à mercredi. Ce policier, qui est lieutenant, sera jusqu’à nouvel ordre affecté à des tâches administratives, où la gestion de situation critique ne sera pas présente. La direction de la SQ, dont le Capitaine Lapointe, a conclu que l’évacuation des automobilistes qui étaient pris au piège dans la neige aurait dû être la priorité lors de l’intervention et être ordonnée plus rapidement plutôt que de continuer à déployer de l’énergie durant plusieurs heures à la réouverture des voies de circulation qui étaient enneigées. Monsieur Lapointe a mentionné que le policier qui était responsable de la gestion n’a pas pris les bonnes décisions et qu’il aurait dû tenir compte que plus que le temps passait, plus les citoyens avaient le besoin d’être secourus. Sa responsabilité était de voir au bon déroulement des opérations et cela n’a pas été fait correctement.
La SQ sévit de nouveau envers un autre de ses policiers le 19 mars. Cette fois, c’est un capitaine qui en a subit les conséquences. Il devient donc le deuxième policier à être blâmé pour l’incident sur l’autoroute 13. Tout comme son collègue, il sera affecté à des tâches administratives jusqu’à ce que l’enquête interne soit conclue. Selon Paul Laurier, enquêteur retraité de la SQ, il y 2 possibilités pour laquelle la situation de l’autoroute 13 s’est produite : il n’a pas pris les bonnes décisions ou il n’a pas informé ses supérieurs. Monsieur Laurier avait raison puisque le 20 mars, l’enquête interne de la SQ a révélé que la chaîne de commandement avait été brisée et que ceux responsables de l’opération ont empêché que l’information se rendre rapidement aux palliers supérieurs dont Martin Coiteux, ministre de la sécurité publique. Les cadres responsables de l’opération ont conservé l’information à leur niveau et ne l’ont pas transmis aux supérieurs ce qui fait en sorte que le ministère ainsi que le ministre Coiteux n’ont pas été mis au courant de ce qui se passait.
Il est plutôt inhabituel pour un policier ayant un grade élevé comme celui de capitaine de recevoir une suspension administrative. Selon certains cadres, les sanctions à venir pourraient s’avérer sévères. Cela explique peut-être pourquoi le directeur Prud’homme pousse pour que la lumière soit faite rapidement sur les responsabilités de chacun dans cette affaire. Le corps policier a affirmé dans un communiqué, qu’à la conclusion de l’enquête interne, des sanctions disciplinaires pourraient être imposées aux gestionnaires fautifs. Le titre de capitaine est le troisième en importance dans la catégorie des officiers au sein de la SQ, derrière ceux d’inspecteur-chef et d’inspecteur. C’est de trente à cinquante agents de police, gérés par des lieutenants, qu’un capitaine a à sa charge. Celui-ci se rapporte à un inspecteur qui est responsable d’un territoire qui lui est assigné. Comme le mentionne monsieur Laurier, un capitaine a le devoir de s’assurer que tous les effectifs soient bel et bien en place sur le terrain. Il n’est pas sans rappeler que durant le mois de février de l’année 2015, des compressions budgétaires pour respecter l’équilibre budgétaire du gouvernement Couillard ont fait en sorte que plusieurs cadres de la police provinciale ont vu leur poste se faire abolir.
Un nouveau directeur des mesures d’urgences a également été nommé par la Sûreté du Québec en ce 20 mars. Il s’agit de Jimmy Potvin. Il occupait un poste d’inspecteur-chef. Durant l’été dernier, il fût responsable de l’opération d’intervention sur l’autoroute métropolitaine à Montréal suite à un accident impliquant un camion-citerne. Selon le capitaine Lapointe, monsieur Potvin aura comme premier mandat de revoir les pratiques, les chaînes de communication, d’actualiser les méthodes et les moderniser afin de les rendre plus efficaces et s’assurer que les bris qui se sont produits dans la chaîne de commandements comme celle sur l’autoroute 13 ne se reproduisent pas. Il est donc important de revoir les mesures d’urgences ainsi que la communication interne et externe.
Par ailleurs, une enquête criminelle avait aussi été entamée par la Sûreté du Québec concernant des camionneurs qui auraient refusé de collaborer afin de se faire remorquer. Le corps policier a procédé samedi matin, le 18 mars, à l’arrestation d’un des camionneurs responsable du blocage de l’autoroute 13 Sud, Palwinder Singh Johal. Celui-ci aurait refusé de se faire remorquer et c’est ce qui aurait par le fait même perturbé la circulation et empêché de dégager la route. Le suspect pourrait être accusé par voie de sommation et faire face à des accusations criminelles de méfait et de nuisance. Il a été libéré le lendemain.

Photo: Patrick Sanfaçon Image:La Presse