Plus de contraventions rime avec plus d’argent dans les poches des cadres du SPVM.

Suite à la récolte des statistiques salariales du corps policier de la ville de Montréal pour l’année 2016, les chiffres qui en ressortent révèlent que près de 3% de l’ensemble des budgets alloués aux salaires des cadres policiers furent versés sous forment de bonis salariaux. C’est donc 350 000$, apparaissant sous le nom de montant forfaitaire sur leur talon de paie, qui furent versés à plus d’une centaine d’inspecteurs, de commandants et divers autres cadres du SPVM. Ces montants, appelés «Boni$ Deni$» par les membres de la fraternité policière, en lien avec leur apparition suite à l’arrivée de monsieur Denis Coderre à la mairie de Montréal, ne font pas l’unanimité chez les membres du corps policier. Effectivement, pour ses membres, ces bonis entachent l’image de leur réseau en présentant les policiers comme des collecteurs de taxes, et ce au détriment de leur mandant traditionnel de maintenir la paix et d’appliquer la loi.

Le syndicat des agents avait d’ailleurs lancé une campagne publicitaire critiquant directement le maire et ces agissements douteux dès le début de l’année 2016. Par le biais de panneaux publicitaires, on invitait les automobilistes à être prudents, car ils pénétraient le territoire de Denis Coderre et s’exposaient donc à des risques plus élevés d’être accostés par les patrouilleurs montréalais. Ce risque serait dû à la pression plus intense mise sur les policiers de la région métropolitaine pour qu’ils produisent un fort rendement en matière de distribution de constats d’infractions. Il semblerait que l’administration du SPVM oriente ses effectifs vers des zones souvent critiquées comme étant des «trappes à tickets». Un directeur adjoint du SPVM a d’ailleurs reçu la somme de 7073$ sous forme de montant forfaitaire pour l’année d’attribution 2016. Cela permet de constater à quel point la récompense offerte par le maire vaut réellement la peine pour les supérieurs et qu’elle modifie leurs agissements en leur faisant miroiter de très gros montants.

Photo : Simon-Marc Charron / Radio-Canada

Monsieur Coderre a rétorqué à cette attaque explicite de la part de son corps policier en justifiant son attribution de bonis. Pour lui, l’efficacité de son corps de police se mesure au nombre d’arrestations et c’est cela qui prouve que ses membres travaillent rigoureusement et ne se tournent pas les pouces. Une réponse qui ne lui attira guère plus de sympathies de la part des membres des 49 postes de quartiers du SPVM. Pour eux, donner des tickets ne fait pas partie de leurs priorités puisqu’ils sont formés pour vaincre la criminalité. Cette attitude se reflète d’ailleurs chez plusieurs membres de corps policiers autres que celui de la ville de Montréal et fait partie intégrante de la sous-culture policière.

spvm-quartier-general-facadeLe 20 février 2017, c’est l’opposition officielle du conseil municipal de Montréal qui s’attaqua à cette attribution de bonis proportionnelle au nombre de constats d’infraction délivrés par les agents. Effectivement, il est vrai que les gouvernements possèdent un impact important sur les organisations policières en détenant divers pouvoirs, dont celui de décider du budget qu’ils accordent à leur corps de police. Par contre, pour l’opposition au maire Coderre, cette pratique des bonis est illégale puisqu’elle représente une méthode arbitraire des pouvoirs de la mairie et va à l’encontre du principe de la séparation des pouvoirs. Il est vrai qu’on assiste ici à une sorte d’ingérence dans les pouvoirs puisque la ville tente de modifier les opérations policières sur le terrain. Il y a également un glissement dans le pouvoir législatif lorsque le maire et ses associés orientent les divers politiques et actions policières vers des horizons lui étant directement bénéfiques et rentables monétairement. C’est pourquoi plusieurs s’opposent à cette technique en la jugeant anticonstitutionnelle. Dans notre démocratie, les lois servent à encadrer notre société de manière consentie par la majorité et non à générer des revenus aux instances politiques.

Il faudra donc suivre les dénouements de l’histoire des « Boni$ DeniS » dans les mois à venir pour voir la décision des tribunaux dans cette poursuite entamée par l’opposition s’appuyant sur un argumentaire de défense de notre démocratie moderne.