Abus envers des femmes autochtones: des policiers intentent une poursuite contre Radio-Canada

En octobre 2015, l’émission Enquête à Radio-Canada diffuse un reportage sur des allégations d’abus envers des femmes autochtones faites par des policiers de la Sûreté du Québec. Ce reportage, bien que pertinent, a engendré de nombreuses conséquences. Un an après cette diffusion, des policiers de Val-d’Or (41 policiers) intentent une poursuite envers le géant des médias Radio-Canada pour avoir sali leur réputation. Les policiers réclament un dédommagement de 2,3 millions de dollars, selon La Presse. La Sûreté du Québec déclare que le reportage était «biaisé, trompeur, inexact et mensonger».

Plusieurs femmes autochtones ont prêté leur voix dans le reportage afin de dénoncer plusieurs abus sexuels et/ou physiques de la part des corps policiers. Ce qui est reproché à Radio-Canada c’est d’avoir manqué de nuances et de sources fiables. On a souligné que plusieurs de ces femmes avaient des antécédents avec la justice ainsi que plusieurs altercations à leurs actifs avec des policiers du coin. Ces derniers affirment que plusieurs de ces femmes ont utilisé le reportage pour se venger. Selon cette logique, la présentation de ces informations a entrainé des complications dans la relation qu’entretient la police avec les communautés autochtones. Le climat est devenu plus hostile et malsain en plus d’entacher l’image de tous les policiers, même les moins concernés.

De plus, l’émission Enquête montrait le phénomène d’abus comme étant fréquent et pratiquement normal dans plusieurs situations, ce qui est d’ailleurs aussi reproché à Radio-Canada dans de la poursuite. Pierre Veilleux, président de l’Association des policiers et policières provinciaux du Québec (APPQ), affirme que le reportage a « brisé et ruiné des carrières de jeunes policiers qui étaient dévoués à la cause, des jeunes professionnels […] afin d’obtenir de bonnes cotes d’écoute».

Bien sûr, les médias ont comme objectif principal d’être rentables, de vendre de l’information. Le reportage a été construit afin de jouer sur l’émotion des téléspectateurs, le rendre attirant, pour favoriser les cotes d’écoute.

Lorsque les médias présentent de l’information plus «taboue», ils se défendent en mentionnant que les citoyens ont le droit de savoir. Dans un communiqué de presse, Radio-Canada PoliceFergusonmédiasaffirme que son reportage sur les agressions est intouchable. Il s’«agit d’un reportage préparé en tout point selon les règles de l’art, dont la réalisation et la diffusion se situent au cœur même du mandat de Radio-Canada».

La plupart du temps, les communautés autochtones passent dans l’oubli dans les médias. Et pourtant, la condition des communautés autochtones reste un problème à une plus grande échelle qui inclue «tout le système de justice, l’administration de la justice, les corps policiers, la relation au sein des communautés, les enjeux de sexisme, de racisme […] c’est un symptôme d’une problématique pancanadienne » affirme la ministre de Val-d’Or.

La relation entre la police et les médias est généralement avantageuse pour les deux parties. Mais qu’ils collaborent ou qu’ils soient à couteaux tirés, pour le consommateur, il est important de rester critique quant à l’information produite. Les policiers ont développé une stratégie pour se protéger des médias en quelque sorte, soit de « nourrir la bête avant qu’elle se déplace pour se nourrir ». C’est-à-dire que les policiers s’organisent pour fournir de l’information aux médias afin de contrôler l’information transmise plutôt que ce soit les médias qui viennent récolter l’information et que ce soit eux qui en prennent le contrôle… Dans les deux cas, l’information est construite, transformée et adaptée selon les besoin de celui qui la contrôle.