Deux journalistes de La Presse arrêtés
Le 13 avril 2012 vers 10 h, lors du printemps érable, deux journalistes ont été arrêtés en marge du saccage au bureau de la circonscription de la ministre Line Beauchamp. C’est Philippe Teisceira-Lessard, journaliste pour La presse qui a été arrêté dans des bureaux de la ministre dans le cadre de ses fonctions. Plus loin, le caméraman Martin Chamberland a brusquement été projeté au sol et menotté par des policiers. Alors que les casseurs ressortaient du bureau de la ministre, le journaliste est resté à l’écart dans le couloir et en a profité pour franchir une porte qui avait été forcée et prendre quelques clichés. La porte magnétique s’est refermée et verrouillée derrière lui. Quelques secondes plus tard, des policiers sont arrivés et ont sommé le journaliste de s’identifier. Philippe Tesceira-Lessard leur a présenté sa carte de presse, mais les policiers l’ont tout de même mis en état d’arrestation pour méfaits, vols et entrée par effraction.
Quelques minutes plus tard et une quinzaine de coins de rue plus loin, les policiers heurtaient la tête du caméraman de La Presse contre un véhicule garé derrière lui. «Le policier m’a poussé. Ma caméra est tombée au sol. Il m’a pris par le collet et m’a projeté par terre. Il a mis son genou et tout son poids dans mon dos», explique Martin Chamberland. Les téléphones ainsi que la caméra des journalistes ont été saisis. Ils ont été libérés en début d’après-midi. Pour ce qui est de leur matériel, ils ont pu le récupérer en fin d’après-midi après avoir été libérés de toute accusation.
Éric Trottier, vice-président à l’information de La Presse s’est dit préoccupé par l’arrestation de deux reporters.
Les journalistes sont là pour rapporter ce qui se passe au cours d’événements importants comme les manifestations étudiantes. Ils sont là pour relater ce que les manifestants vont scander, s’il y a des casseurs et pour rapporter si la police fait bien ou moins bien son travail.
Chaque fois que des policiers arrêtent des journalistes dans le cadre de leur travail ou qu’ils leur font entrave, notamment en confisquant leur matériel journalistique, ils montrent qu’ils ne comprennent pas le rôle essentiel des journalistes dans une société démocratique.
Lorsqu’on fait la lecture des journaux ou d’articles sur le web, l’évidence de l’intérêt pour les activités policières et criminelles ne fait pas doute. Les lecteurs ont l’impression que la police et les médias collaborent étroitement, et cela, de façon quotidienne. Cette impression de collaboration produit un résultat médiatique sur les affaires criminelles encore plus convaincant pour le lecteur, croyant que la police et les médias travaillent ensemble pour livrer l’information.
Toutefois, avec l’arrivée d’une technologie puissante, le public médiatique devient de plus en plus large et l’impact engendré est grandissant. Il est de plus en plus difficile de créer un équilibre entre les médias et la police. Les deux entités ne semblent pas toujours avoir les mêmes lignes directrices. Elles sont parfois concurrentes et contradictoires, ce qui peut créer de l’insécurité (David Wilson, Nick Howe, Diane Kemp et Harriet Tolputt ,2011).
Cette affaire souligne la précarité de la relation entre police et journalisme. À ce moment, la présentation positive et le bon vouloir de la police dans l’encadrement des manifestations du printemps érable sont mis en péril. De plus, la rudesse de l’arrestation du caméraman, qui selon la présentation de l’article, ne semble pas s’être opposé, renforce la tension entre les manifestants et les policiers. Après des événements de ce genre, les manifestants ont l’impression que les policiers sont dans le clan opposé et n’assurent pas avec neutralité la sécurité des lieux.
Les médias jouent un rôle important dans la projection d’images de la police, condition préalable d’un ordre social fonctionnel (Reiner, 2007). En effet, cette situation démontre que la présentation médiatique de la police n’est pas toujours positive, ce qui va à l’encontre de ce qu’elle souhaite refléter comme image. On pourrait croire que le public pense que l’organisation policière réagit trop fortement et manque de professionnalisme. La société s’attend à ce que la police contrôle ses émotions, et cela, même lors de situations répétitives de désorganisations comme celles des manifestations du printemps érable. De plus, à ce moment, les policiers n’entretiennent pas de bonnes relations avec les médias. Les médias peuvent détecter une mauvaise intention de la part des policiers comme celle de l’utilisation de leur matériel (photos, caméra). Si de telles situations se produisent à répétition, les situations où la police utilise les médias pour avancer dans leurs démarches comme celles de saisies d’images enregistrées et de demandes d’aide au public pourraient devenir limitées.
En dénonçant ce qui s’est produit lors de cet évènement, le lecteur croit que le journal défend ses droits pour nous assurer de l’information de qualité. Il croit aussi que les médias n’accepteront pas de se faire prendre le fruit de leur travail, soit ce qui a été récolté sur le terrain. Si le journal La Presse défend cette situation avec vigueur, le lecteur percevra qu’il fera de même pour protéger ces sources par exemple. Ceci rejoint le témoignage de l’avocat Iain MacKinnon dans l’article Un journaliste doit remettre son matériel d’enquête à la GRC «Leur crédibilité et leur indépendance seront entachées si les gens croient que tout ce qu’ils disent aux journalistes peut facilement être remis à la police». C’est pourquoi il est important que le journal assure aux lecteurs qu’il n’acceptera pas de telles contraintes de la part des policiers et que ces derniers ont avantage à travailler en collaboration.