En réaction aux attentats de Bruxelles: La médiatisation du niveau de sécurité au Canada

Selon un article écrit par Vincent Brousseau-Pouliot, le niveau d’alerte de sécurité au Canada restera « inchangé » et ce malgré l’attentat terroriste de Bruxelles. L’auteur explique que, néanmoins, la vigilance des forces policières sera renforcée dans les métros et les aéroports. Il semble que depuis 2014 le niveau d’alerte de sécurité fédéral est à «moyen» et ce même suite aux attentats de paris. Selon le ministre Goodale, les transports en commun sont des infrastructures critiques du pays en ce qui a trait à la vie publique. Entre autres, le Métro de Montréal aurait d’ailleurs augmenté la présence policière. Excepté cette présence qualifiée de rassurante pour le public, aucune autre mesure telle que la fouille des usagers par exemple, a été jugée pertinente afin d’assurer la sécurité. La STM soutient posséder un protocole de sécurité secret advenant un attentat terroriste. Parallèlement, ce stratagème d’augmenter la visibilité des services de sécurité est aussi appliqué dans les aéroports.

Le ministre Goodale recommande toutefois aux citoyens de «rester vigilants». Le maire Coderre pour sa part offre son soutien au ministre Wallon et donne sa collaboration au maire de Bruxelles. Il dit être choqué par ces événements et explique qu’il ne «faut pas céder à l’intimidation» par solidarité, les drapeaux sont mis en berne. L’article se conclut en indiquant qu’une voiture de police est stationnée devant le consulat belge à Montréal.

Dans cet article, l’auteur nous fait comprendre que le Canada considère avoir suffisamment de mesures pour combattre ce qu’il considère être la menace numéro un du pays.

Les méthodes pour maintenir la sécurité d’un pays s’articulent de différentes façons. Les médias y participent implicitement. En ce sens, ce genre de nouvelles propage non pas les stratégies et les plans d’interventions, mais bien un message étatique indiquant que la sécurité au Canada est efficace. Non seulement on entretient l’image d’une sécurité présente, mais on donne aussi une «mission» au simple citoyen. On lui demande de participer à la sécurité nationale en étant plus vigilant. Il est même probable que de donner cette responsabilité aux citoyens permettrait du même coup d’encourager le partage d’informations entre le public et les instances de sécurité. Cela pourrait permettre de faire avancer les enquêtes ou de mettre la main sur une nouvelle piste qui mènerait à un groupe d’individus radicalisés.

Si le gouvernement n’a pas jugé qu’il y avait raison de s’alarmer davantage, c’est que les rapport n’indiquent pas de hausse de terrorisme au pays. La société du «risque» se visualise en terme de probabilité. Ainsi, le niveau de sécurité du pays doit être conséquent avec les analyses statistiques. Bien qu’il y ait une augmentation des attentats terroristes dans certain coin du monde, il semble qu’au Canada cette augmentation soit négligeable. Toutefois, les points chauds et les individus à risque seulement sont couverts par une surveillance accrue.

Loi antiterroriste

Afin de mieux comprendre la fibre qui compose la sécurité canadienne, il convient de poser la pierre d’assise de la sécurité fédérale en matière de terrorisme. D’abord un peu d’histoire : En 2014, le rapport public sur la sécurité du Canada fait état de la situation en matière de sécurité fédérale. Dans ce rapport, le ministre Blaney souligne l’existence de la menace terroriste au Canada et l’importance d’y faire face. «Le terrorisme demeure la principale menace pour la sécurité nationale du Canada», affirme Blaney. Ce rapport préparait en fait la venue d’une nouvelle loi proposée par le gouvernement Harper et votée en 2015, la loi antiterroriste de 2015 (projet de loi C-51). Selon Harper, cette loi: «prévoit protéger encore plus les Canadiens de la menace terroriste grandissante».

La Loi antiterroriste de 2015  intègre une infraction au Code criminel. Ainsi toute promotion ou commission du terrorisme sera traduite en justice. Pour lutter contre le recrutement, les juges peuvent ordonner la saisie et la confiscation du matériel de propagande. Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) obtient le droit d’intervenir (ici, il n’est pas expliqué de quelle façon) dans le but de démanteler des complots terroristes précis. Concernant la sécurité des transports, le programme de protection des passagers a été amélioré en empêchant les déplacements aériens qui concernent des activités liées aux terrorismes. De plus, les policiers ont plus de droits en matière de détention temporaire. La loi prévoit aussi une facilitation d’échange de renseignements de sécurité nationale «entre les ministères et organismes fédéraux». Pour terminer, la loi donne au gouvernement plus de pouvoir pour refuser l’entrée et le statut à des non-citoyens qui pourrait représenter une menace pour le Canada. Plus de protection est prévue pour les témoins et autres participants à des procédures liées à la sécurité nationale.

Le ministre Blaney a aussi affirmé dans son rapport qu’«il est essentiel de surveiller en permanence l’évolution de la menace terroriste pour orienter les efforts de contre-terrorisme du Canada». Il semble en effet que la surveillance soit centrale pour protéger un pays de toute menace. Ainsi, la sécurité au Canada s’articule avec l’obtention de renseignements. C’est pourquoi lorsque le pays veut augmenter son niveau de sécurité, il doit donner plus de pouvoirs aux agences de renseignement et aux agents de sécurité nationale, en leur permettant plus de droits dans les procédures d’instigations et d’investigations. La loi antiterroriste prévoit exactement ce genre de procédure. À cet égard, au moment de la sortie de la loi C-51, rappelons que certains citoyens craignaient de perdre leur liberté au profit de leur sécurité.

D’ailleurs, certains organismes ont même contesté devant la Cour supérieure la constitutionnalité de C-51, sous prétexte qu’elle violerait la charte canadienne des droits et libertés. Selon des juristes, cette loi rendrait la société plus poreuse et serait susceptible d’entraver la vie privée des Canadiens.

Compte tenu de ce qui précède, le fait que cet article fasse briller par son absence la loi C-51 n’est peut-être pas fortuite. En ce sens, on peut supposer que cet « oubli » a pour objectif de ne pas réveiller la controverse qui lui est associée.

Pour des nouvelles bien lisses

Avant sa parution les journalistes s’assurent de bien lisser la nouvelle. Pour atteindre ce résultat, l’auteur de cet article a stéréotypé soigneusement l’information sans aller trop en profondeur. Effectivement, son message est plus près du populisme politique que de la réelle information. Par ailleurs, il a pris soin d’utiliser un gros titre qui peut presque donner l’impression au public d’avoir accès à de l’information sur les secrets nationaux : «Niveau d’alerte de sécurité «inchangé» au Canada, mais sécurité accrue».

Quoi qu’il en soit, il semble que l’auteur sache présenter sa nouvelle de façon standard afin de vendre la nouvelle tout en passant un message politique fait sur mesure.

Bref, l’article semble avoir comme objectif de rassurer la population et non de l’informer. D’une part; rassurer en dévoilant l’augmentation du déploiement policier dans les zones critiques. D’autre part, amener les gens à devenir plus prudents, plus vigilants et peut-être même, leur donner l’envie de divulguer toute information qui pourrait concerner une potentielle menace ou tentative de propagande. En responsabilisant les citoyens, on leur rappelle qu’ils font eux aussi partie de l’équation pour assurer la sécurité du pays.