Fusillade à Terrebonne, à la façon du Journal de Montréal

Les sources de nature médiatique occupent, de nos jours, une place énorme dans le domaine de l’information. On compte parmi ces dernières, les médias sociaux, les journaux, la radio, les nouvelles télévisées, etc. N’étant pas difficiles d’accès, ces sources d’information sont régulièrement fréquentées par tout individu qui est soit à la recherche de divertissement, ou à la recherche de renseignements sur certains évènements ou sujets. Ainsi, la connaissance qu’ont les gens concernant ce qui se déroule dans le monde, mais surtout sur ce qui arrive dans leur environnement proche provient, en grande partie, de ce qui est véhiculé par les médias.

Comme ils semblent être la majeure voie de communication de notre époque, il est pertinent de s’attarder à la façon dont les médias partagent leurs connaissances. Effectivement, comme le commun des mortels s’appuie sur ce qu’il voit, sur ce qu’il lit et sur ce qu’il entend dans les médias pour fonder ses opinions, il semble primordial d’analyser leurs activités et fonctionnements. Dans le cas de ce présent article, la question de la nouvelle criminelle sera utilisée.

Or, en ce qui concerne les nouvelles criminelles, les médias d’information, mais aussi de divertissement vont venir déformer la réalité. En effet, dans un objectif de vendre le plus de copies de journal possible ou d’avoir une bonne cote d’écoute (puisque le produit, ici, c’est le lecteur et l’auditeur), les médias doivent utiliser les nouvelles comme moyen pour parvenir à leur fin. Ainsi, ces dernières doivent être intéressantes et elles doivent attirer l’attention du public. C’est donc pour cette raison que les journalistes, par exemple, vont modifier, exagérer et stéréotyper les évènements. Ces critères sont, entre autres, ceux pour lesquels ils sont engagés, soit leur capacité à transformer des faits ordinaires» en des nouvelles qui feront sensation. Pour y parvenir, les journalistes vont être sélectifs en ce qui concerne les crimes qu’ils vont présenter. En ce sens, ils vont choisir des crimes générateurs d’émotions, ce qui implique souvent des actes violents et non communs. Ainsi, cela va créer une surreprésentation des crimes qui en réalité ne surviennent que très rarement comparés à d’autres actes illégaux, comme les homicides versus les vols.

 

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Prenons en exemple la fusillade qui a eu lieu le 21 mars dernier, à Terrebonne. En bref, Yannick Larose, résident de Terrebonne et propriétaire d’une compagnie de vitres teintées, a succombé à des blessures par balles. Il semblerait s’agir d’un « règlement de compte » entre lui et un compétiteur du marché des vitres teintées. Yannick Larose était connu par les policiers et par la justice pénale, car il avait été arrêté en 2009 pour extorsion, complot d’extorsion, méfait public et entrave à la justice. Il a fait, entre autres, la « une des journaux » concernant ces accusations.

 

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Au total, plus de cinq articles ont été rédigés à ce sujet, presque tous publiés au même moment et relatant des faits très semblables, à quelques différences près. Étant celle la plus utilisée par d’autres sources médiatiques, la version du Journal de Montréal est celle qui nous intéresse le plus dans ce cas. Effectivement, l’auteur de cet article a su tirer de la nouvelle des aspects qui rendent l’évènement encore plus « intéressant » pour les lecteurs. Il a su utiliser un vocabulaire de choix afin de relater les faits, où des termes et expressions tels que «sous les yeux horrifiés», liquidé, cible, etc. ont été utilisés. En ce sens, dès le premier paragraphe, il est possible pour le lecteur de s’imaginer la scène de crime comme étant violente et sanglante. De plus, l’auteur associe cet évènement à ceux qui ont eu lieu lors de la Guerre des motards entre 1994 et 2002, soulignant que le modus operandi est le même. Finalement, il ne rate pas de rappeler que ces évènements ont fait plus de 160 morts, et ce, au Québec.

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Il semble donc essentiel de se demander quelles sont les conséquences d’une telle représentation des affaires criminelles. En effet, de telles déformations et exagérations de l’information peuvent avoir des impacts importants, dont celui de participer au maintien du sentiment d’insécurité et de la « peur du crime » chez les citoyens. Par exemple, le fait que cet évènement soit à la source de plus de cinq articles peut donner l’impression à la communauté qu’il s’agit d’un délit très grave et qu’il y a l’existence d’un réel danger. Effectivement, les gens peuvent penser, par exemple, que les motards tentent de prendre le contrôle de l’endroit et qu’ils représentent un risque important. Ainsi, les citoyens vivent avec un sentiment d’insécurité, ce qui peut entraîner des attentes démesurées face à la police, comme celle de croire que les effectifs policiers vont augmenter. Dans la même ordre d’idée, ces fausses représentations et ces surreprésentations pourraient accentuer le désir de la société d’avoir un système de justice pénale de plus en plus punitif et sévère.

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