Le SCRS s’implique davantage dans la lutte aux djihadistes
En février dernier, le Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS) a annoncé qu’il doublerait les efforts en ce qui concerne la lutte contre l’État Islamique qui se déroule actuellement au Moyen-Orient. Il semble être question ici de compenser pour le retrait des six CF-18 canadiens et la déception que cela a amené chez les alliés de la coalition contre l’EI. Aucun détail quant au rôle exact que jouera l’agence n’a été dévoilé, mais le ministre de la sécurité publique, Ralph Goodale, a affirmé que le Canada s’impliquerait dans la lutte en fournissant davantage de renseignements de sécurité. À prime abord, certains citoyens prétendent que le retrait de ces avions, et donc l’arrêt de l’utilisation de la force, est une bien piètre idée. Toutefois, en prêtant attention au mode de recrutement qu’utilisent les djihadistes ainsi qu’aux moyens qu’ils utilisent pour diffuser leur propagande, on peut constater que la décision du Canada semble tout à fait appropriée.
Tout d’abord, il est important de savoir que les défendeurs de l’État Islamique recrutent leurs jeunes sympathisants sur le web et qu’ils préconisent plus précisément les réseaux sociaux. Il faut premièrement se poser une question: qui sont les jeunes qui tombent dans cet engrenage et qui intègrent les rangs? Souvent, ce sont des adolescents ou de jeunes adultes qui ne possèdent qu’un petit réseau social. À force d’être seuls, ils se réfugient sur le web et l’anonymat que cela apporte. Lorsqu’un djihadiste entre en contact avec eux, ce qui se fait rapidement si le jeune fait une recherche sommaire sur les réseaux sociaux concernant l’EI, il leur fait tout d’abord croire qu’ils feront enfin partie d’un groupe, d’une famille. Le recruteur amadoue sa « victime » et teste son influençabilité. Plus le jeune est influençable, plus la radicalisation sera rapide. Se sentant maintenant fort parce que membre d’un groupe qui lui semble si enviable, il en vient à rejeter les modèles sociaux qui l’entourent et même à se ranger contre sa propre famille. L’auteur Stéphane Berthomet a voulu valider l’existence de ce processus de recrutement pour son dernier livre La fabrique du djihad. L’expérience fut concluante. En moins de trois semaines, il a été mis en contact avec un des plus grands recruteurs français, aujourd’hui décédé.
Les priorités du SCRS, telles qu’établies par l’agence elle-même, sont le filtrage de sécurité, le terrorisme, la prolifération des armes de destruction massive, l’espionnage et l’ingérence étrangère ainsi que les menaces pour la sécurité de l’information. «Mais le rôle principal de l’agence est d’enquêter sur les activités qui pourraient constituer une menace pour notre pays – catégorie dans laquelle on inclue le groupe État Islamique. Le SCRS sert également de liaison avec les services de renseignement de pays étrangers. Les services du SCRS se répartissent en différentes catégories: la collecte et l’analyse de renseignements, l’échange de renseignements, le filtrage de sécurité, l’échange d’information avec le public ainsi que la recherche avec divers experts. Ce sont toutes des activités qui sont utiles pour contrer la progression de l’EI. Avec l’aide du Centre de la sécurité des télécommunications (CST) et son expertise en cryptologie et en interception, ils sont en mesure d’apporter une aide à la lutte antiterrorisme. Il n’est toutefois pas toujours simple de recueillir les informations jugées pertinentes, comme il a été possible de constater en voyant le litige qui oppose le FBI à la compagnie technologique Apple.
Sachant que le groupe recrute ses membres principalement via les réseaux sociaux, il semble logique d’investir dans des moyens de défense tels que le SCRS pour lutter contre le terrorisme. L’essence même d’un groupe radical de cet envergure réside dans la peur qu’il suscite, oui, mais également en la foi qu’ont ses membres envers ledit groupe. L’État Islamique en est rendu à cette « puissance » parce qu’il réussit à recruter des loups solitaires partout autour du globe. C’est une puissance qui repose pourtant sur des technologies. S’il n’arrive plus à entrer en contact avec son auditoire, la diffusion de sa propagande s’en retrouvera grandement affectée.
L’État Islamique, c’est avant tout une idéologie, et on ne peut tuer une idéologie en lançant simplement des bombes. En plus de tuer de nombreux civils, c’est tout simplement inefficace. Pour vaincre un groupe de ce genre, c’est à la base qu’il faut s’attaquer, à la propagande qui est envoyée à nos jeunes pour les inciter à joindre le mouvement. Comme l’a si bien dit Gandhi, « en opposant la haine à la haine, on ne fait que la répandre, en surface comme en profondeur ».