Faux profil virtuel pour coincer les pédophiles

Le contrôle social informel, c’est le contrôle que les membres d’un groupe social exercent les uns sur les autres. C’est aussi une forme de contrôle de plus en plus présente sur Internet. En 2013, un projet d’envergure naît sous le pseudonyme de Sweetie, une petite fille virtuelle de 10 ans pouvant allécher les pédophiles sur la Toile. C’est l’organisme non-gouvernemental Terre des Hommes, qui milite pour les enfants et leurs droits, qui mettait en Sweetie en ligne, avec pour objectif de piéger les pédophiles. À terme, Sweetie a su délivrer plus de 1 000 identités de pédophiles aux services policiers.

Fait intéressant à relever ici, ce projet représente l’initiative première de la communauté, sans passer par la bureaucratie étatique. Ce système de surveillance prendrait-il quelques notions de base des mécanismes de protections féodaux ? Sur une période de dix semaines, quatre chercheurs ont porté le masque virtuel de petites Philippines et non pas moins de 10 000 hommes ont établi un contact via des plateformes de discussion instantanées. Dans une courte capsule tournée par la chaîne BBC News au Royaume-Uni, l’un des quatre chercheurs expose à quel point les pédophiles masculins d’âge plutôt mature sont très facilement appâtés par l’idée d’une jeune enfant seule sur l’internet.

Néanmoins, l’office de police criminelle intergouvernemental Europol (European Police Office) a tenu à apporter une certaine nuance à ce projet communautaire [TRADUCTION] «Nous croyons que les investigations criminelles usant de mesures de surveillance intrusives devraient être la responsabilité exclusive des agences d’application des lois». Autrement dit, les policiers ne semblent pas approuver l’existence d’initiatives comme Sweetie.

Les prédateurs sexuels sont dorénavant prévenus de la facilité avec laquelle ils peuvent être retracés. Toutefois, la question que nous devrions nous poser est bien celle de savoir : était-ce la bonne manière d’envoyer ce genre d’avertissement aux délinquants sexuels du net ?  Sur ce blogue, le sujet de la surveillance des télécommunications par le CST, Centre de sécurité des télécommunications, montre à quel point on joue la carte de la surveillance et de la sécurité. Bref, le besoin constant des canadiens à tout contrôler tout en écartant les comportements déviants du reste de la société peut finir par créer une autre sorte d’insécurité. Néanmoins, le chef du projet Sweetie, Monsieur Hans Guyt souligne que: « […] Le seul moyen de trouver ce genre de personnes est de patrouiller sur Internet». Malgré l’appareil étatique de surveillance, il ne semble pas suffire à la tâche.

Le projet Sweetie fut stoppé quelques temps après la divulgation des informations recueillies aux corps policiers, mais l’essentiel positif de ce projet a été conservé : la patrouille citoyenne du web à la recherche de potentiels dangers à la pornographie juvénile et toutes formes de pédophilie.

La surveillance informelle d’un quartier résidentiel exercée sur ses habitants, la bienveillance des parents face à leurs enfants ou encore la solidarité entre pairs sont tous d’excellents exemples comme quoi il n’est pas toujours nécessaire de s’en remettre aux corps policiers et aux institutions de surveillance formelles. C’est bien ce qu’aura montré l’organisme Terre des Hommes en montant ce projet aussi positif qu’il soit. Sa communauté et ses partisans auront pris en main la tutelle des dangers que représente l’internet, une technologie aussi révolutionnaire et utile que dangereuse et en constante évolution.