Blue Moon: l’univers des agences de sécurité privée

La nouvelle série québécoise Blue Moon, qui  est offerte exclusivement sur Club Illico depuis le 25 janvier dernier, nous fait plonger au cœur d’une entreprise de sécurité privée. À la suite du décès accidentel d’Yves Laurier, sa fille Justine (Karine Vannasse) devient l’actionnaire majoritaire de Blue Moon, une firme de sécurité privée qui œuvre pour le compte d’agences gouvernementales, mais dont les opérations clandestines frôlent l’illégalité.

Pour les services secrets, une unité d’élite de Blue Moon démantèle des réseaux de trafiquants de drogues, mais nous comprenons bien vite que les choses ne tournent pas rond. Les détournements de fonds et les pots de vin sont nombreux. Certains membres haut placés au gouvernement sont aussi impliqués et contribuent au blanchiment d’argent et des agents de Blue Moon vont jusqu’à commettre des agressions, voir même des homicides, dans le cadre de leurs opérations. Bref, ils opèrent en toute impunité et lorsqu’ils se font questionner par la police publique municipale, ils finissent toujours par passer entre les mailles du filet.

Or, est-ce que, parce qu’ils agissent pour le gouvernement, ils ont de tels droits? Leur mandat n’a-t-il pas de limites? Est-ce que les agents d’une entreprise de sécurité privée ont le pouvoir de commettre de tels crimes sans subir de conséquences quelconques?

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Les pouvoirs des agents de sécurité privée sont complexes. En théorie, ils ont les mêmes droits que les citoyens ordinaires. Selon le contexte, toutefois, ils peuvent bénéficier de pouvoirs qui dépassent même ceux des policiers puisqu’ils sont mandataires des propriétaires de lieux privés, sans compter que la Charte canadienne des droits et libertés ne s’applique pas à leur travail. De ce fait, les citoyens ont moins de protection contre les actions des agents de sécurité privée que contre celles des policiers.

Les agences de sécurité privée du Québec sont tout de même encadrées par la Loi sur la sécurité privée et par le Règlement sur les normes de comportement des titulaires de permis d’agent qui exercent une activité de sécurité privée. Donc, les agents de sécurité privée doivent éviter toute forme de mauvaise conduite. Ils ne peuvent pas avoir recours à une force plus grande que celle nécessaire et les menaces, l’intimidation ainsi que le harcèlement leur sont interdits. En conséquence, les agressions, les homicides, les vols et la corruption dont nous sommes témoins dans Blue Moon sont tout à fait illégaux. Dans la vraie vie, ils auraient vraisemblablement fait l’objet de plaintes au Bureau de la sécurité privée, mais probablement que cela n’aurait pas fait une aussi bonne intrigue de série télévisée si tel avait été le cas dans Blue Moon.

Comme toute fiction policière, il faut voir cette série avec un certain grain de sel. Il faut être conscient qu’à la télévision, même les actualités sont amplifiées afin de rendre l’«intrigue» intéressante et d’augmenter les cotes d’écoute. Il ne faut pas oublier que les médias sont une industrie en pleine révolution, assaillis de toute part par les technologies de l’information. Ceci explique également que si en général les médias et la police ont une bonne relation de coopération, les policiers peuvent rapidement devenir la cible d’une frénésie médiatique. À titre d’exemple, nous n’avons qu’à songer à l’agente de police Matricule 728, qui a fait les manchettes pendant plusieurs semaines, pour savoir que les médias aiment bien les histoires des bavures policières et d’abus de pouvoir et savent que cela fait réagir massivement le public.

Cela dit, souvenons-nous du cas du sergent Serge Lefebvre, un policier de Ste-Foy, qui commettait des vols sur des lieux commerciaux durant ses heures de services et qui déguisait ses délits pour qu’il ne soit pas soupçonné. Ou de Benoît Roberge, ce policier qui vendait des informations policières à des membres des Hell’s Angels. Il y a donc un fond de réalité à Blue Moon, la corruption est malheureusement réelle.