Les femmes dans la police, des exigences de parité à la reconnaissance de qualités

A l’occasion de la journée mondiale de la femme du 8 mars 2015, de nombreuses associations et organisations ont mis à l’honneur le succès des femmes policières dans un corps de métier traditionnellement réservé aux hommes. En effet, les préjugés entourant la réussite professionnelle des femmes dans la police sont nombreux. Les attributs féminins, tels l’émotivité, la fragilité physique,  ont longtemps été considérés, à tort, incompatibles avec l’exercice de telles fonctions.

Pour autant, la tendance actuelle semble démentir les idées préconçues traditionnelles. On recense de plus en plus de femmes parmi les nouvelles recrues des polices par-delà le monde. Ces dernières contribuent à renouveler les pratiques traditionnelles et à « humaniser » le travail policier. À l’heure où de nombreuses initiatives gouvernementales visent à augmenter les effectifs féminins parmi les rangs de la police, les femmes sont particulièrement recherchées pour leurs qualités professionnelles et humaines.

Du renouvellement de la culture policière, aux expériences de différents pays, comment se décline l’intégration des femmes dans la police et quelles motivations la sous-tendent ?

Le renouvellement de l’univers policier

Longtemps considérées comme trop « fragiles » pour mener des interventions physiques ou endurer des enquêtes, les femmes eurent de la difficulté à briller dans un environnement masculin, exaltant la force, la virilité et la brutalité. Les femmes présentes dans les équipes et sections étaient ouvertement décrites comme des « handicaps » par leurs collègues masculins, pour qui il était parfois honteux et dégradant d’être adjoint d’une femme.

Depuis une dizaine d’années, la tendance s’infléchit dans de nombreux pays : les femmes sont de plus en plus nombreuses à investir les métiers de la police. En France, si on ne comptait aucune femme parmi les rangs de CRS (Compagnies Républicaines de sécurité) en 2009, elles constituent aujourd’hui 8,4% des effectifs. Elles représentent en général de 15 à 30% des corps de gendarmerie et de police.

Au Québec, selon un rapport du ministère de la Sécurité publique publié en 2011, le nombre de policières a augmenté de 74% depuis 2000. Deux policiers sur cinq âgés de moins de 25 ans sont aujourd’hui des femmes.

Pour autant, beaucoup d’entre elles travaillent au sein des corps administratifs et techniques. Les postes de direction demeurent attribués aux hommes.

Des compétences qui font l’unanimité

De nombreuses initiatives gouvernementales tentent de rétablir l’équité dans la distribution des postes. Les raisons de cette intégration nouvelle sont nombreuses et s’étendent au-delà d’un impératif de parité.

Selon la Professeure Kerry Carrington, du Queensland University of Technology, des équipes composées de femmes aideraient à répondre au crime d’une façon plus appropriée. Le 9 mars 2015, l’universitaire invite à établir des postes de police exclusivement féminins en Australie. Ces derniers aideraient à réduire les violences domestiques en facilitant le report des agressions et l’établissement d’un climat de confiance entre la population féminine et le corps policier. Reconnues pour leur sensibilité et leur écoute, les policières sont préférées à leurs homologues masculins dans l’établissement du dialogue social.

Le Réseau des femmes policières belges estime aussi qu’une combinaison des caractéristiques homme-femme dans des équipes mixtes permettrait d’améliorer considérablement le travail policier. La composition de la police doit se faire le « reflet de la société » afin d’anticiper ses évolutions et répondre au mieux aux besoins d’un environnement pluraliste. La présence pondérée  de femmes dans les équipes permettrait la réalisation d’un travail diversifié, la multiplicité des approches et augmenterait les performances du corps policier.

Une pratique reprise par les pays en développement

Si les pays du Nord s’appliquent depuis une dizaine d’années à intégrer les femmes, cette tendance gagne désormais les pays en développement. De nombreuses polices de pays du sud font désormais ce choix dans un but de réduction de la criminalité. Tel est le cas de l’Inde qui s’illustre aujourd’hui par de nombreuses initiatives.

Le 8 mars 2015, le Commissaire de police de la ville de Dehli, Mr. Bassi, a annoncé 45 promotions de femmes à des postes d’inspecteur. Il entend ainsi donner une autre teneur aux efforts engagés pour la réduction des crimes commis à l’encontre des femmes. La présence prochaine de 150 femmes inspecteurs –aujourd’hui 105- a pour but d’aider aux déclarations des plaignantes et à l’établissement d’un climat de confiance.

Dans un contexte d’augmentation inquiétante des violences faites aux femmes, la ville de Bengaluru (Etat du Karnataka) a annoncé la mise en place de six unités spéciales composées spécifiquement de femmes. Reconnues pour leur apport de sensibilité dans l’investigation, cette mesure répond à la mauvaise représentativité des femmes dans les corps policier par rapport à la société indienne, où les femmes sont largement majoritaires. Il s’agit également d’amener des femmes sur les terrains et ainsi les extraire du carcan des carrières administratives dans la police.

D’abord motivée par des impératifs de parité et de représentativité, l’intégration progressive des femmes dans l’univers policier est aujourd’hui légitimée par les qualités propres reconnues aux policières. L’introduction d’une touche féminine aux corps de police contribue à l’élaboration d’un nouveau policing, plus humain et sensible, plus à même de répondre aux besoins de sociétés pluralistes. Ce phénomène ne connait pas de frontière, alors que l’Inde multiplie les initiatives d’intégration des femmes. Les vertus reconnues aux femmes dans l’exercice de leurs fonctions ont triomphé sur l’alibi vétuste de la culture masculine policière.