Une taupe au sein du service de police de Sherbrooke ou bien une erreur lors de l’enquête interne?

Dans notre société, il est difficile de déterminer exactement quelles sont les fonctions des policiers puisque celles-ci sont fortement déformées par les médias et les opinions publiques. Certains sont d’avis que le rôle des policiers est de détecter et faire la répression des crimes. Mais, en réalité, la fonction principale du policier est de prévenir le crime et de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique. Le policier dispose non seulement de pouvoirs afin de répondre à ses fonctions, mais il a aussi des devoirs et des obligations à respecter. Dans l’exercice de leurs fonctions, tous les policiers doivent suivre une série de règles de conduite qui sont inscrites dans le code de déontologie policière. Le problème ici, c’est qu’on sait très bien que certains d’entre eux ne respectent pas ce code et dépassent largement ce qu’il leur est permis de faire. La plupart des policiers qui ne respectent pas les procédures et qui sont corrompus font l’objet d’une enquête et doivent répondre de leurs actes devant les tribunaux, mais quelques-uns, comme le policier Alex Therrien, réussissent à y échapper. Pour mieux comprendre, commençons par le début…

Tout commence le 3 novembre 2008, à Sherbrooke, le policier Alex Therrien, policier depuis une dizaine d’années, a frauduleusement, directement ou indirectement, obtenu des services d’ordinateur, commettant ainsi l’acte criminel. Puis, vers le mois de septembre 2012, il commet un abus de confiance dans le cadre de ses fonctions. En effet, il utilise le centre de renseignements policiers du Québec (C.R.P.Q) pour transmettre de l’information à un tiers non autorisé, commettant de nouveau un acte criminel. Rappelons que le C.R.P.Q est un organisme de renseignements qui contient les descriptions de biens volés et de voitures volées, et qui a accès à d’autres banques de données telles que le registre national des délinquants sexuels, le réseau canadien intégré d’identification balistique, le registre des armes à feu, etc. Bref, des renseignements auxquels les citoyens ordinaires, et encore moins les criminels n’ont pas accès. Pour continuer, au mois d’octobre 2012, il commet encore un abus de confiance dans l’exercice de ses fonctions en transmettant de nouveau de l’information contenue dans le C.R.P.Q à un tiers non autorisé. Finalement, au mois de décembre 2012, cela se répète. Par conséquent, Alex Therrien fait face à quatre chefs d’accusation pour avoir utilisé frauduleusement un ordinateur et le Centre de renseignements policiers du Québec, ainsi que pour avoir transmis de l’information à un tiers non autorisé. En 2013, il a donc été arrêté et détenu par la Sûreté du Québec, où il a été interrogé en attendant sa comparution. Par la suite, il a été remis en liberté avec une suspension sans solde pour la durée des procédures. Son procès était prévu pour le 11 juin 2013.

Les réactions ont été nombreuses, dont le maire de la ville de Sherbrooke, Bernard Sévigny, qui était rassuré qu’une telle enquête ait lieu à l’interne : « On a encore la capacité de réagir à l’interne, de s’auto-enquêter et quand il y a des irrégularités que l’on puisse y mettre un terme et prendre les actions en conséquence. C’est le volet qui est rassurant, mais pour l’image du corps de police, c’est tout de même difficile. » Par contre, il est d’avis que «ce n’est pas une bonne nouvelle pour l’image des policiers, ni même pour la Ville». Même si ce n’est qu’un policier qui est accusé, c’est toute l’organisation policière qui écope. La confiance des citoyens envers le service de police est effectivement compromise. Un citoyen a affirmé que «c’est grave comme circonstance, ça vient miner la confiance qu’on peut avoir envers les policiers». Quant au président du syndicat des policiers de Sherbrooke, Robin Côté, il précise qu’Alex Therrien n’a aucune tache à son dossier et qu’il a le droit à la présomption d’innocence. Il est donc surpris par cette nouvelle. C’est un choc aussi pour ses collègues qui ont eux-mêmes arrêté Alex Therrien. Un de ses collègues a confié aux journalistes que «quand on apprend qu’un des nôtres va être accusé, c’est certain que c’est désarmant. Personne ne s’attend à ça et personne ne veut ça non plus». Certes, personne ne s’attendait à cela.

Un an après son arrestation, Alex Therrien est blanchi de toutes accusations. La procureure aux poursuites criminelles, Me Julie Laborde, a décidé de retirer les chefs d’accusation qui pesaient contre lui. Ses seules explications ont été celles-ci : «à la lumière de récentes informations qui nous sont parvenues et dans l’intérêt supérieur de la justice, c’est la décision qui a été prise ». L’avocat d’Alex Therrien s’est exprimé sur le cauchemar que le policier a vécu à cause des allégations fausses et mensongères, qui n’étaient appuyées par aucune preuve. En effet, le policier réclame un montant de 325 000$ à la ville de Sherbrooke, au directeur du SPS, Gaétan Labbé et au capitaine à l’Éthique et aux normes professionnelles de l’époque, pour dommages moraux, stress, inconvénients, difficultés financières et dommages exemplaires. Il souhaite aussi reprendre son service auprès de service de police de Sherbrooke. L’association des policiers et policières de Sherbrooke réclame une enquête indépendante afin d’avoir des éclaircissements sur l’enquête interne faite par le capitaine Mario Lebrun. Le syndicat soutient que le capitaine Lebrun a fait des affirmations fausses et tendancieuses. « On a des prétentions voulant que ça été mal fait. Alors, en faisant une enquête indépendante, on fera la lumière sur ce qu’on prétend », croit-il. Donc, le syndicat et l’association des policiers et policières de Sherbrooke attendent toujours des réponses.

Bref, on peut s’apercevoir qu’il y a des failles non seulement au sein des corps policiers, mais aussi dans les enquêtes internes. Je pense que c’est un gros problème, surtout pour ce qui est de la confiance du public envers les services de police, parce qu’on ne sait même plus si le policier était vraiment une taupe ou si c’est la personne qui était chargée de l’enquête interne qui n’a pas fait son travail selon les règles. L’enquête aurait dû être confiée à la GRC ou à un autre service de police, et non au service de police de Sherbrooke puisque c’était un de ses membres qui étaient accusés. Ce sont des erreurs qui ne devraient pas arriver au sein des organisations policières.