Tué pour avoir tenu une manette de Wii

La St-Valentin est reconnue pour être une fête rouge. Ce fut le cas à Euharlee, petite communauté de 4000 habitants en Géorgie, mais pour une tout autre raison. Dans la soirée du 14 février, deux agents de police, un homme et une femme, se rendent au 937 Euhar Lee Road afin de mettre en application leur mandat et arrêter le père de la famille pour violation de ses conditions de probation. Il est 7h30 lorsque les policiers cognent à la porte de la demeure, sans se douter qu’une terrible tragédie était sur le point d’arriver. La suite des événements prendra effectivement un tournant tragique. Christopher Roupe, 17 ans, se lève du divan, ouvre la porte aux policiers et est immédiatement abattu par la policière, Beth Gatny. Qu’est-ce qui pourrait pousser un policier à faire feu sur un jeune homme? L’agente en question se défend que Christopher tenait une arme à feu dans les mains, pointée en leur direction. Mais voici le nœud de l’histoire. Les témoins sont catégoriques, Christopher ne tenait aucune arme, mais plutôt une manette de console de jeux vidéo Wii. Effectivement, les témoignages des témoins sur place affirment que Christopher s’apprêtait à écouter un film lorsqu’il entendit des coups à la porte. Il se leva, manette à la main, et demanda qui était-ce, sans réponse. C’est alors qu’il ouvrit la porte et que la tragédie arriva; il fut atteint en pleine poitrine par le tir de l’agente de police. Les parents et proches de Christopher le décrivent comme un jeune homme attentionné qui rêvait de faire sa vie au sein des marines. Ken Yates, voisin de la maison où se déroula le drame, fut attiré par le bruit de la détonation et affirme avoir assisté à une autre scène assez évocatrice : l’agente Gatny, une fois à l’extérieur, se retira et sanglota, la tête entre les mains. De plus, Yates apporte l’hypothèse que Christopher jouait plus tôt avec ses copains et qu’il aurait été possible qu’il ait en sa possession un pistolet à air comprimé.

Christopher Roupe, 17 ans

Bien que cela vienne appuyer les propos de la policière, ce ne sont que des spéculations. Toute cette histoire n’est-elle qu’une grosse et tragique erreur? Christopher avait-il à la main une manette de Wii ou un pistolet à air comprimé? Pour l’instant on ne peut dire qui dit vrai, car l’histoire fait toujours l’objet d’une enquête par le Bureau d’Investigation de Géorgie. On nous rapporte aussi que Beth Gatny a été suspendue pour une période indéterminée. Bien qu’il soit impossible pour le moment de jouer aux juges et excuser ou non l’agente de police, les plus récentes nouvelles ne jouent pas en faveur de la policière. En effet, selon son historique au sein de différents corps policiers, Gatny n’est pas sans taches. Plusieurs manquements et avertissements concernant ses méthodes de travail, mais le plus choquant, ce n’est pas la première fois qu’elle ouvre le feu en direction d’un individu pour des raisons nébuleuses. En effet, en 2008, lors d’une altercation, elle ouvrit le feu sur un individu qui tentait d’enlever son sac à dos, convaincue qu’il s’apprêtait à y sortir une arme. Heureusement, le tir manqua. Bien que son collègue affirma qu’elle n’avait aucune raison de tirer, elle fut innocentée par les affaires internes, car l’appel à laquelle elle répondait l’avait averti que les suspects pouvaient être armés. Bref, l’enquête qui est en cours nous permettra, une fois arrivée à terme, de nous éclairer sur la situation.

Beth Gatny, agente de police

Personnellement, j’ai de la difficulté à comprendre pourquoi il est possible que de telles situations arrivent. Je comprends qu’une arme puisse faire partie de l’équipement de base d’un policier, mais de là à la pointer en direction de la porte avant même qu’on l’ait ouvert, je trouve cela dur à concevoir (rappelons-nous que nous ne sommes qu’en contexte de mandat pour violation de condition de probation). Effectivement, Beth Gatny avait déjà dégainé son arme et était prête à tirer lorsque Christopher ouvrit la porte. Elle avait supposément entendu le bruit d’un mécanisme d’arme à feu. Est-ce nécessaire, à la base, de laisser des agents de police armés s’occuper des mandats d’arrestation pour simple violation de probation? Peut-être que dans la mentalité américaine ce l’est, mais en regardant ailleurs on peut vite s’apercevoir que des alternatives existent. Pensons, par exemple, au modèle anglais. Les policiers, nommés « bobbies », ne portent aucune arme à feu. Au lieu de les entraîner à apprendre à manier une arme mortelle, on leur apprend d’autres techniques qu’ils peuvent utiliser dans divers contextes. À la limite, les policiers pourraient être simplement accompagnés d’un agent en veston-cravate (avec un gilet par balles, par sécurité) spécialisé dans les cas de probation et cela diminuerait déjà de beaucoup les risques d’escalade. Ce dernier pourrait s’occuper de toutes les interactions verbales et aurait la sécurité d’être accompagné de policiers en cas de besoin. Une solution toute simple, mais qui aurait probablement pu sauver la vie d’un jeune homme de 17 ans.