18e manifestation contre la brutalité policière à Montréal
Nous avons tous déjà entendu parler de la fameuse manifestation contre la brutalité policière se déroulant chaque année à travers différentes villes du monde. Ces protestations ont lieu tous les 15 mars depuis 1997. L’événement a débuté en réponse aux événements du 15 mars 1996 lorsque deux jeunes de 11 et 12 ans, en Suisse, ont été violentés par des agents de police.
Ces manifestations dénoncent l’abus de pouvoir et l’usage de force démesurés par les forces de l’ordre ainsi qu’un acharnement excessif envers certaines couches de la population. Il est donc du devoir de chacun, citoyen, journaliste et politicien, de se questionner sur cette institution qui semble avoir des comptes à régler envers certains groupes.
Il serait peut-être judicieux de rappeler que le Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) a été fortement critiqué par le conseil de sécurité des Nations Unies en 2005 et que l’ONU a condamné les tactiques policières utilisées lors du sommet du G20 en 2010 à Toronto. Il est important de souligner que le SPVM applique encore ces mêmes tactiques (Francis Dupuis-Déri, 2012).
Cette année a eu lieu la 18e manifestation contre la brutalité policière à Montréal. Celle-ci a débuté à 15 h au coin des rues Jean-Talon et Chateaubriand. Ce lieu est symbolique puisque c’est à cet endroit même que, quelques mois auparavant, un policier de la SPVM a menacé un jeune sans-abri de l’attacher à un poteau, sans vêtements, s’il ne quittait pas le lieu immédiatement.
Encore une fois, les rues de la métropole de Montréal ont été les lieux de plusieurs débordements. La marche à peine entamée, les protestants ont été pris en souricière par le SPVM, les empêchant ainsi de marcher dans les rues pour faire valoir leur droit d’expression. La manifestation a été déclarée illégale moins de cinq minutes après le début de la marche parce que les organisateurs n’avaient pas fourni d’itinéraire. Il est quand même ironique que ces individus, voulant dénoncer les répressions policières, soient dans l’obligation de fournir à ceux qu’ils dénoncent les moyens nécessaires d’être contrôlés. Une fois la manifestation déclarée illégale, les forces de l’ordre, munies de leurs porte-voix, ordonnent aux manifestants de se disperser, rappelons que les protestataires sont encerclés par les policiers et donc dans l’impossibilité d’obtempérer.
Ne lésinions pas sur le fait que le corps policier a pris toutes les dispositions nécessaires pour veiller à ce qu’il soit en avantage numérique: SPVM, Sûreté du Québec, policiers à vélo, polices montées, hélicoptères et escouades antiémeutes étaient au rendez-vous. (Vidéo) « Pour manifester à Montréal, il faut être prêt(e) à être pourchassé(e), à se faire violenter et à rester à l’extérieur, immobile, été comme hiver, sans eau, sans accès à des toilettes, etc. Voilà le prix à payer pour ce qu’il nous reste de liberté d’expression » indique Isabelle Baez, auteure et chargée de cours à l’UQAM.
D’après le journal La Presse, 288 manifestants se sont vus remettre un constat d’infraction en vertu de la loi P6, pour « port de masques ou de tissu recouvrant le visage en plus de prendre place à une manifestation déclarée illégale ». L’amende s’élève à environ 637 $. De plus, des charges criminelles ont été déposées contre cinq manifestants. Dû à une manœuvre policière, un homme de 22 ans a été blessé à l’arcade sourcilière.
« Au nom de la vitre brisée, on tue la liberté d’expression. Au nom de la vitre brisée, on justifie une violence physique inouïe. Au nom de la vitre brisée, on se ferme les yeux sur les abus policiers que les organisateurs de la manifestation annuelle contre la brutalité policière tentent justement de dénoncer » – Adis Simidzija, étudiant à la maîtrise en sociologie à l’Université de Montréal
Lors de la 15e manifestation policière le 15 mars 2011, une plainte avait été déposée contre le commandant du SPVM, Dominique Verret, pour avoir ordonné illégalement la prise de photo des personnes ayant été arrêtées. Il a dû comparaître devant le Comité de déontologie policière pour la raison suivante:
« Lequel, à Montréal, le ou vers le 15 mars 2011, alors qu’il était dans l’exercice de ses fonctions, n’a pas respecté l’autorité de la loi et des tribunaux et n’a pas collaboré à l’administration de la justice, en ordonnant de photographier sans droit des personnes détenues pour une infraction au Code de la sécurité routière, dont (le plaignant), commettant ainsi un acte dérogatoire prévu à l’article 7 du Code de déontologie des policiers du Québec (Chapitre P-13.1, r.1). »
Du côté du C.O.B.P (Collectif opposé à la Brutalité Policière), un appel est lancé à tous afin de retracer les témoins d’utilisation de forces excessives qui ont eu lieu lors de la manifestation du 15 mars 2014. Le collectif tente aussi de coordonner la contestation des contraventions, intenter d’autres recours contre les abus du SPVM ainsi que porter des plaintes visant la déontologie policière.
« La surveillance policière fournit à la prison les infracteurs que celle-ci transforme en délinquants, cibles et auxiliaires des contrôles policiers qui renvoient régulièrement certains d’entre eux à la prison. » – Michel Foucault, Surveillez et punir, 1975