Tueries aux États-Unis, Sandy Hook amène un petit pas vers l’avant
Des crimes se produisent tous les jours c’est un fait établi, mais certains suscitent une plus grande attention et une réponse plus importante de la part de la population en raison de certaines caractéristiques particulières. Parmi les pires tragédies, on retrouve entre autres les tueries, qui sont de plus en plus nombreuses, surtout aux États-Unis. Selon les critères du FBI, une tuerie consiste en un incident où, dans un même endroit, au moins 4 personnes sont tuées par le même et unique agresseur et sans laps de temps considérable entre les meurtres. Considérant ces caractéristiques, on a recensé 7 tueries en sol américain en 2012, dont celle de l’école Sandy Hook, à Newtown au Connecticut, qui s’est déroulé le 14 décembre 2012.
Le rapport final publié le 27 décembre 2013 par le Commissioner of the state Department of Emergency Services and Public Protection relate les événements. Le tireur, Adam Lanza a d’abord assassiné sa mère, Nancy Lanza, au domicile familial avant de se diriger vers l’établissement scolaire où il a fait encore 26 victimes avant de s’enlever la vie à l’arrivée des policiers. À 09:35, la police a reçu un appel de détresse signalant la présence d’un tireur actif à l’école Sandy Hook. À l’arrivée des premiers répondants sur les lieux moins de 3 minutes plus tard, tout était déjà terminé. Parmi les victimes se trouvent 20 écoliers âgés entre 6 et 7 ans, 15 d’entre eux se trouvaient dans la même pièce, ayant tenté de s’y cacher pour éviter le tireur. Les victimes adultes étaient des membres du personnel, dont la directrice et la psychologue qui auraient tenté d’arrêter l’individu. Le rapport nous apprend aussi que Lanza avait été diagnostiqué avec de graves troubles psychologiques, dont un manque de compréhension des interactions sociales et des communications ainsi que des symptômes obsessifs-compulsifs. Il semblerait que le jeune aurait dû prendre une médication pour contrôler ses troubles, mais que sa mère aurait refusé de les lui donner et n’aurait pas assuré le suivi de son fils par un spécialiste.
L’événement a suscité une attention médiatique soutenue et a ouvert la porte à plusieurs débats de la part des dirigeants politiques et de diverses associations, notamment sur la législation des armes à feu au pays, le traitement des troubles psychologiques et la sécurité dans les endroits publics. Tous ces sujets sont encore source de réflexion au parlement américain et quelques actions ont été prises à ces sujets, mais il reste encore beaucoup à faire pour en arriver à des politiques concrètes. La plupart des initiatives proposées par les démocrates rencontrent une opposition au congrès qui subit la pression des associations qui ne veulent pas voir certaines lois être changées, surtout au sujet de la possession des armes à feu. Comme le but de ce blogue n’est pas l’analyse des politiques mais bien du policing, laissons ces débats de côté et concentrons nous sur les changements à ce sujet.
Le Bureau Fédéral d’Enquête, mieux connu comme le FBI, est la principale agence gouvernementale de sécurité nationale et de renseignement intérieur aux États-Unis. Une des fonctions de cette agence est la formation d’officiers des forces de l’ordre à divers niveaux, dont celui de la réaction aux situations de « mass Killing» offert par le Strategic Information and Operations Center. Dans un article du Huffingtonpost le responsable de ce service dit , en parlant de l’intervention policière: « you don’t need negotiators, you don’t have time to wait for SWAT teams, you need to get in there as fast as possible and stop the killing”. Ces propos démontrent bien l’importance pour les premiers répondants d’agir rapidement lors d’une fusillade pour diminuer le nombre de victimes. C’est pourquoi, après la tuerie de Newtown, le Président Obama a déclaré que le FBI allait collaborer avec les départements de police locale à travers le pays dans le but de standardiser la procédure à suivre lors de réponse à de tels événements.
L’ancienne procédure voulait qu’à l’arrivée des policiers sur les lieux du crime, ceux-ci contrôlent la scène, sécurisent le périmètre et appellent le SWAT pour obtenir de l’aide. Un tel protocole laissait au tireur un temps considérable pour continuer de commettre des meurtres. De nouvelles normes d’intervention sont dorénavant établies et le FBI a la tâche de les enseigner aux agents des divers services de police locale, ainsi qu’aux intervenants en sécurité dans les lieux publics comme les écoles. Selon la nouvelle procédure, le policier devrait intervenir directement en direction du tireur à son arrivée sur la scène, ne pas attendre de renforts. Une telle pratique, bien que plus rapide et efficace, comporte une plus grande part de danger pour le policier qui doit intervenir seul et souvent moins armé que le tireur. À ce sujet, certaines recherches montrent qu’un policier sur trois sera lui-même atteint par balle alors qu’il intervient seul en confrontant le tireur. En d’autres mots, ce que ce nouveau protocole d’intervention sous-entend, c’est que le pouvoir d’agir du policier n’est pas seulement un droit, mais un devoir.
Il s’agit ici d’un bel exemple de balancier entre la force coercitive que l’État donne à la police et des responsabilités qui y sont attachées. Par force coercitive, on entend ici le fait que l’État, ayant le monopole de la force, octroie au policier une autorité sur la population générale et aussi une force d’action sur celle-ci. Il a le droit d’arrêter une personne, de saisir dans ses biens et même de lui causer des lésions si la situation le nécessite, comme dans le cas qui nous intéresse. Pour justifier l’application de cette force coercitive, on nous dira que dans une situation d’urgence où quelque chose de grave se produit, il faut que le policier ait le pouvoir de désamorcer la situation.
Ces changements dans les pratiques d’interventions policières états-uniennes suscitent toutefois une question majeure, car ce que l’on demande aux policiers au fond, c’est de risquer leur vie afin qu’il y ait le moins de victimes possible à la fin, mais est-ce que le gain en vaut le risque?
Il semblerait que oui et la preuve a été faite le 15 janvier dernier en Indiana quand un tireur est entré dans un supermarché. Les premiers policiers arrivés sur les lieux, suivant leur nouvelle formation, sont entrés rapidement et ont mis fin à la situation en seulement quelques minutes.
Il s’agit d’une amélioration considérable de la réponse policière au crime, mais reste le constat que, bien qu’elle diminue le nombre de victimes, elle n’empêche pas ces tueries de se produire encore et encore.
Ping : Le FBI a été prévenu du désir de tuer du suspect dans la tuerie en Floride mais n’a pas agit. | Actu Policing